Pour l’égalité des femmes et des hommes dans la langue

« La langue est magique. Elle fait apparaitre et disparaitre les gens et les choses ».
(Nicole Brossard, citée dans A Feminist Dictionary, 1985)

 

Il y a bien une quarantaine d’années, les citoyennes commençaient à inscrire leur présence dans la langue française, au fur et à mesure de leur accession à la sphère publique.

Le premier point de mire? Indubitablement adapter les titres qui coiffaient les nouvelles titulaires de fonctions.  Les dénominations adoptées par l’usage se sont démarquées par deux aspects : d’abord, la très grande popularité des formes en –eure (metteure en scène, annonceure, chroniqueure, entraineure, investisseure, penseure, monteure de film, etc.) qui permettaient d’inclure les deux genres subséquemment dans des énoncés – fait crucial – sans avoir à les dédoubler (les entrepreneurEs plutôt que les entrepreneuses et entrepreneurs).

Puis, pour d’autres mots à finale unique en genre, le féminin a pris place dans le déterminant plutôt que dans la dénomination même : une témoin, une médecin, une conseil juridique, une camelot, une préfet, etc. Ces formes communes – assurément à privilégier – pour désigner tous genres (les substituts, les chefs, les matelots, les gourmets, et ainsi de suite) rallient la très vaste majorité des francophones. Cette tendance aux formes uniques a de surcroit freiné bien des dédoublements indésirables : une commise et un commis, une préfète et un préfet, une mannequine et un mannequin, etc.

Outre les titres féminins désormais bien acquis, le second volet sur lequel agir s’avérait sans conteste la règle grammaticale stipulant que « le masculin l’emporte sur le féminin », règle sexiste s’il en est une, pourtant aujourd’hui encore enseignée dans les écoles. L’ancienne règle de proximité, réactivée depuis plusieurs années déjà, pallie avec pertinence et finesse le mantra d’inéquité grammaticale entre les genres, en laissant libre cours à l’accord en genre avec le nom le plus près. Ses occurrences se multipliant, point déjà, là-bas à l’horizon, cet instant où « le masculin plus noble » aura sombré dans la désuétude.

Bien d’autres formules ont émergé dans la foulée des innovations langagières, et ce site en recense les principales, essentiellement les plus prometteuses, à savoir qui ne modifient aucunement la prononciation et qui évitent les dédoublements. L’alternance des genres brille par sa justesse à cet égard. Pourquoi donc tout dédoubler quand un seul terme – même genré – peut être considéré dans sa globalité?

En définitive, l’originalité de ce site s’affirme dans l’éventail de tournures innovatrices, de libellés hors-normes, de mots avant-gardistes qui prennent intrinsèquement naissance grâce à vous. Grand merci aux francophones, locuteures, journalistes, écrivains, professeurs, politiques, auteures, artistes, chercheurs, publicitaires, chroniqueures, membres de la société civile, à nos prédécesseures et tant d’autres, à leur inventivité, leur sagacité et leur audace!

 

Céline Labrosse